Rechercher dans ce blog

lundi 28 janvier 2013

CONNAîTRE POUR MIEUX AIMER



 Au début de son évangile, Luc annonce qu’il veut faire un récit ordonné, documenté, sérieux, solide, de la vie de Jésus. Tous les écrivains de l'époque commençaient leurs livres ainsi: c'était une façon de donner de la valeur à ce qu'ils écrivaient. Le lecteur devait avoir la certitude que ce qu’il lisait correspondait à la vérité. Ainsi, Luc nous dit qu’il a fait des recherches poussées sur la vie de Jésus, en se renseignant auprès des  témoins oculaires et  fiables qui ont connu et suivi personnellement  le Maitre.
L’évangéliste cherchait à répondre à une exigence fondamentale des chrétiens de  son temps (généralement  des païens convertis)  qui avaient été impressionnés et saisis par la figure de Jésus, par sa pensée, sa spiritualité et qui voulaient connaitre plus profondément  l’âme du Maitre qu’ils aimaient.

Quand vous aimez et admirez quelqu'un, vous voulez tout savoir de lui: ses origines, son histoire, ses amis, ses expériences, ses rencontres, ses idées, ses succès, ses défaites, ses qualités, ses points faibles. Il y a des gens qui se disent chrétiens, donc qui sont en théorie des admirateurs et des disciples de Jésus, mais qui de fait ne sont pas intéressés par lui. Ils ne l’ont jamais vraiment rencontré. Ils n’ont jamais vraiment été touchés par sa parole ou émerveillés par son esprit, par la nouveauté, la beauté, la valeur de ses idées. Ils n’ont jamais vraiment senti ni le désir  ni le besoin de s’en inspirer et d’en vivre. Combien de baptisés ne savent presque rien de Jésus et ils ne cherchent pas à en savoir davantage!  Leur foi finalement n’en est pas une. Car il n’y a pas de foi sans connaissance, confiance, émerveillement, amour, imitation. Leur foi est seulement appartenance sociale et culturelle à une religion tout simplement parce qu’il se trouve qu’ils sont nés en elle. C’est une foi vide, sans fondements ni motivations et qui ne change pas leur vie. C’est la situation de beaucoup de gens dans notre Église composée, en grande partie, en haut et en bas, de ce genre de chrétiens sans foi en Jésus.

Ce drame est le résultat d’une longue déviation dans la façon de concevoir la transmission de la foi. Au lieu de faire consister la foi dans la connaissance et la rencontre personnelle et aimante de Jésus de Nazareth, dans l’Église on a préféré faire consister la foi dans la connaissance des formules théologiques et des dogmes élaborés au cours des siècles autour du phénomène chrétien. D’ailleurs, pour être un bon catholique, il n’est  pas tellement important d’être un admirateur et un affectionné de Jésus, cela est même secondaire; mais il est essentiel d’obéir au Pape, de se soumettre à son l’autorité et d’adhérer aux préceptes, aux directives, aux injonctions, aux normes et aux dogmes qu’il présente comme indispensables au salut de l’âme et pour la formulation desquels il jouit d’une assistance spéciale de l‘Esprit Saint qui lui confère une supposée infaillibilité.

L'une des grandes faiblesses des responsables religieux dans l'Église catholique a consisté dans le fait qu'ils ont beaucoup trop parlé d’obéissance, de docilité et de soumission aux autorités romaines et à l’enseignement presque exclusivement moral du magistère pontifical et pas assez de l’Évangile. Ils ont beaucoup parlé du péché qui nous perd et pas assez de l’amour qui nous sauve; ils ont  beaucoup parlé du diable et pas assez de Jésus. Ils ont prétendu savoir ce qui est bien et ce qui est mal et, en conséquence de cela, ils ont semé dans le cœur des fidèles la peur de Dieu et la culpabilité, au lieu de les libérer et de les aider à vivre dans la paix, la confiance et la certitude d’être aimés. Aujourd’hui encore, dans  l’enseignement officiel, les questions d’éthique et de morale ont encore une place prépondérante, au détriment de la proclamation de la Bonne Nouvelle et du message libérateur de Jésus de Nazareth. Pour faire un exemple,  dans le choix des  évêques, le Saint Siège ne se préoccupe pas de savoir si le candidat est un chrétien épris de Jésus et  vivant de son esprit, mais le Pape veut s’assurer, avant de le nommer, qu’il est contre l’ordination des femmes, contre la fécondation artificielle, contre l’usage du préservatif, contre l’avortement et contre le mariage des prêtres. Ces critères sont exclusivement des critères éthiques et, plus spécifiquement,  des critères reliés, directement ou indirectement, à la sexualité. Et pourtant ils sont devenus des conditions sine qua non pour nommer le responsable d’un diocèse!  Aujourd’hui encore à combien de couples on refuse l’absolution et l’eucharistie parce qu'ils vivent ensemble sans être mariés ou parce qu’ils sont des divorcés remariés, ou parce que ils sont homosexuels …Si on présente Dieu comme un garant de l’ordre moral, comme un policier qui surveille, qui exige, qui comptabilise les fautes,  qui se fâche, qui juge, qui s’intéresse d’une façon morbide et maladive à ce qui se passe dans les chambres à coucher, qui punit les coupables dans le feu éternel, qui est incapable de comprendre que souvent les humains se trompent dans leur choix et qu’ils méritent toujours une deuxième chance … comment voulez-vous que les gens  restent attachés à une  religion qui  prêche un tel Dieu ?  Un tel  enseignement  conduit  à détester et Dieu et la religion. Un grand théologien allemand disait: «Une religion qui a fait de Dieu l’adversaire de l’homme, considère nécessairement comme un adversaire de Dieu celui qui prend parti pour l’homme…On a donc le droit de le pourchasser, de le coincer, de lui régler son compte» (E. Drewermann, Commentaire à l’Évangile de Jean, éd. manuscrite, p. 184).

Alors, beaucoup de chrétiens ont quitté l’église, certains sur la pointe des pieds, d’autres en claquant la porte, car ils ne trouvaient plus dans leur religion ni l’orientation ni la nourriture spirituelle dont ils avaient besoin. Certains ont sombré dans le désintérêt ou l’incroyance; d’autres sont allés chercher ailleurs. Conséquence: nos églises  se sont vidées. On a tendance, dans nos milieux ecclésiastiques, à  mettre ce phénomène sur le dos de la société de consommation, de la sécularisation, de l’incroyance, de l’athéisme, de l’indifférence religieuse, du relativisme, ce qui est vrai en partie. Je pense cependant que la crise est plus profonde et qu’elle est reliée à la fin d’une époque d’inculture et de naïveté  qui a mis fin, à son tour,  à une soumission infantilisante et aliénante au pouvoir clérical d’un côté, et, de l’autre, à une conception mythique et anthropomorphique de Dieu que les autorités religieuses s’obstinent  toujours à maintenir, mais qui aujourd’hui ne passe plus. Pour remettre les choses en place et faire retourner les gens à l’église, il ne suffit plus de lancer les troupes dans une nouvelle  évangélisation ou d’instituer une année de la foi. C’est tout le contenu, la forme, le langage, le vocabulaire de l’enseignement chrétien traditionnel qui doivent être revus et changés. Il faut passer du Moyen-âge à la modernité. Ce que, malheureusement, les hauts responsables de l’Église ont beaucoup de mal  à envisager.
 
 L'ignorance du peuple c’est l'arme que tous les pouvoirs de la terre ont utilisé pour dominer. Alors ne restons pas dans l'ignorance, n'ayons pas peur de connaître Jésus; ayons le courage et la force de nous mettre sous sa lumière et nous deviendrons des personnes éclairées et libérées des conditionnements, des carcans, des peurs et des culpabilités avec lesquels on voudrait nous asservir. Ne nous contentons pas de ce qu’on nous a toujours dit, de ce qu’on nous a toujours enseigné et transmis. Luc aujourd’hui nous dit que nous devons vérifier, étudier, chercher par nous-mêmes le chemin, regarder de nos yeux quel est le vrai visage, l’image authentique de Celui que nous avons décidé de suivre.

MB
(3e dim. ord. C)

mardi 15 janvier 2013

Comprendre la réalité grâce à notre Esprit


JÉSUS, L’HOMME QUI A DE L’ESPRIT

Il y a deux choses qui nous frappent lorsque nous venons en contact avec la personne de Jésus de Nazareth: la qualité de son humanité et la profondeur de sa spiritualité. Jésus apparaît comme un homme qui possède une intériorité et une profondeur spirituelle exceptionnelles. C’est sa richesse intérieure qui a frappé et fasciné tous ceux et celles qui l’ont côtoyés et qui ont spontanément vu en lui un modèle, un maître et une source d’inspiration. Les évangélistes ont exprimé cette impression et ce sentiment en disant que Jésus était un homme rempli d’Esprit. Évidemment pour les gens du temps de Jésus, posséder l’esprit était avant tout une caractéristique de la divinité. Dieu était pour eux l’Esprit par excellence. Dieu est celui qui, par l’esprit qu’il donne, anime et fait vivre tout ce qui est vivant. Cela explique pourquoi ceux qui ont connu Jésus, à cause de la  surprenante et magnifique qualité de sa vie intérieure, l’ont tout de suite connecté à Dieu, en proclamant que Dieu se manifestait en lui d’une façon unique et extraordinaire et que l’Esprit de Dieu était en lui.

Mais indépendamment de cette conception religieuse de l’esprit, commune aux juifs de temps de Jésus, il y une chose qui nous impressionne lorsqu’on regarde vivre et agir Jésus: on dirait qu’à cause de l’esprit qu’il possède, le monde, les choses autour de lui deviennent porteuses d’une révélation, d’un message; se transforment en  manifestations, en signes, en paraboles, en  icônes d’une réalité qui est perceptible seulement à ceux et celles qui ont la qualité de son esprit. En regardant Jésus agir, nous nous rendons compte qu’il est possible à l’homme qui a de l’esprit de vivre dans le monde sans s’y enfermer et sans s’y limiter.

Si nous avons de l’esprit, la réalité devient transparente et nous devenons capables de percevoir la dimension cachée des choses, qui nous fait signe et qui nous permet de rentrer dans une compréhension du monde qui va bien au-delà de ce que nous yeux  peuvent voir et  notre intelligence comprendre. L’esprit  nous permet de devenir sensibles à l’âme du visible afin d’y voir l’invisible; de percevoir la magie des choses; d’entendre l’harmonie à travers laquelle la réalité cherche à faire retentir en nous l’insoupçonnable beauté de tout ce qui existe et surtout  les harmoniques (comme le bruit, le rayonnement fossile) qui nous arrivent de la Source de tout Être, de laquelle tout a pris son l’origine et que Jésus appelle «Dieu».

S’il y une chose que l’on apprend lorsqu’on lit les évangiles et qu'on regarde le comportement de Jésus, c’est que l’esprit dans l’homme n’est pas quelque chose qui va de soi, mais un don qui vient d’en haut et qui n’est pas nécessairement attaché à notre nature humaine. On peut être des humains sans être des spirituels. On peut avoir intelligence et raison et être totalement dépourvus d’esprit. L’esprit est une qualité supplémentaire  de notre être qui permet à notre nature de s’humaniser, de lui  donner sensibilité, grandeur et dignité et qui fait de nous des êtres humains accomplis. Car, à la rigueur, on peut être un homme ou une femme sans être vraiment humains. Il y des personnes qui passent à travers leur vie sans jamais s’humaniser; sans jamais sentir ni le besoin, ni l’appel de l’esprit. Pour ces gens le monde est fermé sur son immédiateté; composé seulement de matières premières, de biens de consommation, d’intérêts économiques, de ressources à exploiter, de rendement, d’argent, de besoins matériels et corporels à satisfaire. Pour ces gens une forêt est seulement du  bois à couper; un troupeau de brebis qui broute sur les flancs verts de la montagne, c’est uniquement de la laine et des gigots; des coquelicots en fleurs dans un champ de blé, des mauvaises herbes à éradiquer; notre terre qui flotte  dans l’espace comme une perle bleue, qu’une planète du système solaire… pas de poésie, pas de transparence, pas d’âme, pas de commotion, pas de sentiment d’un mystère plus grand, pas d’échos d’une musique qui peut faire soupçonner une mélodie secrète qui se joue quelque part au-delà des simples apparences. Pour ceux qui n’ont pas d’esprit le monde est opaque, muet, banal, prosaïque, insignifiant …et terriblement  triste.  

 Regardez par contre le monde dans lequel Jésus a vécu! Tout autour de lui parle, révèle, annonce, indique un ailleurs, une Présence, une Beauté, une Force bienveillante et amicale qui est à l’oeuvre partout pour élever, transformer, renouveler, guérir, sauver, créer de l’émerveillement, de la joie, de la liberté, de la confiance, de l’amour, un nouveau mode de vie, une nouvelle forme d’humanité: les fleurs et l’herbe des chants; les oiseaux de l’air; le figuier au printemps; la vigne à l’automne; le laboureur qui laboure la terre en hiver; les ouvriers qui attendent d’être embauchés à l’été;  la femme qui balaie la maison; celle qui pétrit la pâte pour la faire fermenter; la tempête sur le lac; les pécheurs qui jettent les filets; le voisin dérangeant; la femme agaçante qui demande justice; l’administrateur malhonnête qui assure son futur; l’enfant difficile qui quitte la maison paternelle pour gaspiller son argent avec les prostituées … tout, tout aux yeux de Jésus devient signe, parabole, message; tout laisse transparaître une réalité différente; tout s’anime autrement; tout apparaît autrement aux yeux de cet homme rempli de l’esprit… Pour cet homme tout semble advenir pour nous interpeller; tout semble être là pour nous aider à grandir en humanité; tout semble être le résultat d’un Amour caché qui cherche à tout prix à franchir les barrières de notre insensibilité, de notre aveuglement et de notre indifférence pour nous éveiller à une réalité divine qui est perceptible seulement aux yeux de l’esprit.

L’homme de Nazareth nous fascine à cause de son esprit. Et c’est cet esprit qui est à l’origine du mouvement chrétien. Ceux et celles qui sont devenus ses disciples sont ceux et celles qui ont voulu adopter son esprit; qui ont voulu se rapporter à la réalité avec les mêmes dispositions intérieures et la même sensibilité spirituelle  qu’ils ont observé en Jésus; ce sont ceux et celles qui ont décidé de regarder désormais le monde avec les yeux de ce Maître et de se laisser emporter par le courant de cette Source de tout Amour qu’ils ont découvert á l’œuvre au cœur de la réalité. C’est pour cela qu’ils se sentent sauvés.

Nous comprenons alors qu’être chrétien, avoir la foi, n’est pas du tout une question de connaissance de vérités, de savoir, de retenir pour vraies des affirmations dogmatiques, de professer un credo; d’être d’accord avec le Catéchisme de l’Église Catholique de Jean Paul II ; d’adhérer à une  institution, de se soumettre à une autorité ecclésiastique … avoir la foi c’est une attitude intérieure; c’est vibrer en consonance avec l’esprit de l’Homme de Nazareth ; c’est vouloir expérimenter dans la vie les mêmes valeurs qui l’ont fait vivre; c’est ressentir ce qu’il ressentait; c’est vouloir regarder la réalité avec ses mêmes yeux; c’est aimer avec un cœur  semblable au sien; c’est vouloir être le genre d’homme qu’il a été.

Dans la recherche et la consolidation de son pouvoir, l’Institution ecclésiastique a toujours préféré mettre l'essence de  la foi chrétienne  dans la connaissance plutôt que dans l’expérience personnelle d'une vie animée par l'Esprit de Jésus. On comprend aisément cette attitude de l'Institution: elle peut contrôler et déterminer les contenus des ses dogmes et donc des connaissances des fidèles, tandis que l’expérience personnelle de la rencontre avec le Maître Jésus lui échappe inexorablement.


MB



lundi 7 janvier 2013

Epiphanie, c'est quoi ça ?


UNE RÉVÉLATION QUI BOULEVERSE

Épiphanie signifie manifestation. C’est une des fêtes chrétiennes les plus anciennes. Plus ancienne encore que la fête de Noël qui n'a officiellement commencé à être célébrée en Occident qu'à partir du cinquième siècle, pour remplacer la fête païenne dédiée au Dieu Soleil avec laquelle on célébrait le solstice d'hiver. Pour les chrétiens, l'arrivée des journées plus longues et la présence d’une lumière plus intense et  plus prolongée ont commencé à symboliser la venue de Jésus, la vraie lumière venue dissiper les ténèbres de la faute et du  mal. Par contre, la  fête du Baptême de Jésus, où il est présenté par Dieu comme un fils bien-aimé et comme le messie qu'il a choisi pour se manifester dans le monde, est déjà célébrée en Orient depuis le deuxième siècle.


Les premiers chrétiens, dispersés dans le monde païen où on avait l’habitude de célébrer toutes sortes d’interventions des divinités dans les temples et les cultes païens, ont vite senti la nécessité d’opposer à ces manifestations païennes la seule manifestation  qu'ils considéraient comme la vraie et authentique révélation  de Dieu au monde : Jésus de Nazareth, fils de Marie. Trois événements de  la vie de Jésus ont  été choisis de préférence à d'autres pour exprimer la foi chrétienne en la révélation de Dieu à l'humanité de Jésus : la visite des mages à l'enfant Jésus, le baptême de Jésus dans le Jourdain, le miracle de Jésus aux noces de Cana en Galilée, où il avait changé l'eau en vin.


 Les chrétiens ont toujours été frappés par le mystère de Dieu que Jésus leur avait révélé comme présent et actif, non seulement dans le monde mais aussi et surtout dans leurs vies. «Le royaume de Dieu est en vous», disait Jésus. Ils ont donc ressenti le besoin de célébrer d'une manière particulièrement intense le mystère de cette présence et de cette manifestation. Pour eux, Dieu n'est  plus maintenant un être lointain, secret, inaccessible, mais un Dieu qui est sorti de son éternité; qui a fait irruption dans le temps des hommes et qui est entré dans leur histoire. Pour les chrétiens Dieu s'est approché de nous ; il s’est manifesté dans les gestes de notre condition humaine, à travers  la présence, l'action, les paroles et la vie de Jésus.


Pour les chrétiens, Jésus est celui qui nous montre le visage de Dieu ; celui  qui est l'image la plus parfaite de Dieu; il est celui en qui l'Esprit de Dieu agit dans le monde de la manière la plus complète et la plus parfaite. Pour les chrétiens, Jésus est le signe visible et le sacrement de la présence de Dieu dans le monde. Qui  voit Jésus vivre et d'agir, a devant les yeux le modèle le plus accompli de l’homme sauvé, transformé, libéré et divinisé. Il a devant les yeux la plus sublime réalisation d’humanité. Il a devant lui le prototype de l’homme devenu «fils de Dieu». L'évangéliste Jean exprime cette foi des chrétiens dans la réponse  que Jésus donne à Philippe lorsque celui-ci  lui demande de lui  présenter Dieu, son Père: «Philippe, ne sais-tu pas que celui qui me voit, voit le Père?".  Jésus devient le prototype, l'image de tous les mystiques, de tous les saints, de tous les sauvés, de tous les rachetés,  de tous ceux  et celles qui ont construit leur vie sur la certitude de l'existence et de la présence de Dieu et de tous ceux et celle qui, de cette conviction et de cette foi,  tirent leur  force, leur  joie de vivre, le sentiment  de leur  dignité, de leur valeur, de leur grandeur et le sens de leur existence. Désormais, nous sommes tous,  comme Jésus, les enfants bien-aimés en qui Dieu a placé son amour et sa complaisance et sur lesquels il a fait descendre son Esprit. C'est le mystère qui commémore la scène du baptême de Jésus.


Enfants de Dieu, témoins vivants de sa présence dans le monde ; manifestation de son pouvoir qui guérit, qui sauve et transforme le cœur de tous ceux qui  lui font confiance et s’appuient  sur lui, voilà que nous aussi, comme Jésus, nous devenons capables de changer l'eau en vin, c’est-à-dire de transformer ce monde  en quelque chose de plus  buvable, de plus  agréable et de meilleur. Enfants de Dieu, animés par son Esprit, stimulés et guidés par l'exemple et les paroles de Jésus, nous devenons vraiment des agents du renouvellement du monde et de la société dans laquelle nous vivons. Nous devenons  les bâtisseurs du Royaume de Dieu sur terre. Notre travail consiste à être les mains et les outils que Dieu utilise pour accomplir  le miracle de la  transformation et du salut du monde. Grâce à nous et à travers nous  les ténèbres se changent petit à  petit en en lumière, la haine en amour, la cruauté en compassion, la vengeance en pardon, l'égoïsme en générosité, le pouvoir en service, la violence en douceur,  le désespoir en  espérance, la peur et l'angoisse en  paix et  sérénité, le péché en grâce et  la mort en vie. Oui, à la table de l'existence où nous, chrétiens, nous nous sommes assis, nous assistons maintenant au  miracle de la transformation de l’eau en vin et nous devenons les témoins  de «signes» de «noces» de Dieu  avec notre monde.


L'Épiphanie est la fête de l'universalisme chrétien. Les chrétiens ont désormais la certitude que leur Dieu n'est plus le Dieu d’un peuple particulier (comme le croyaient les Juifs), mais que le Dieu révélé par Jésus est un Dieu universel, qui aime toutes ses créatures sans distinction de religion, de race et de cultures et qui veut sauver tous, parce que tous sont ses enfants. Ce caractère universel de Dieu et du salut proclamé par Jésus, est particulièrement mis en évidence dans le récit des Mages  relaté par  Matthieu. Ces personnages mystérieux qui viennent de l'orient, du pays où le soleil se lève, c’est-à-dire d'un pays lointain, ce sont des païens; ils n’appartiennent donc pas au peuple juif ; cependant, à la différence des Juifs, ils reconnaissent dans l'enfant Jésus le Messie et le Sauveur.


Le but de l’évangile des mages en Mathieu n'est pas seulement d’expliquer que la présence de Jésus au milieu de nous réalise les prophéties anciennes d’un messie qui aurait apporté la lumière et le salut à toutes  les nations de la terre, mais il veut aussi  proclamer que Jésus est la révélation de Dieu au milieu de nous et  que sa parole et sa présence constituent une lumière qui conduit à l'illumination et au salut tous ceux qui ont foi en lui. L'Évangile annonce que tous ceux qui ont la foi, qui se laissent conduire par cette étoile qui brille dans le ciel de leur âme, entreront là où se trouve leur véritable bonheur. L'évangile de ce jour  nous dit donc  que ceux qui savent écouter les aspirations profondes de leurs cœurs, qui osent abandonner les sécurités acquises, qui recherchent des nouvelles réponses à leurs désirs et leurs aspirations, qui risquent le voyage vers un autre pays spirituel et l’inconfort d’une nouvelle adaptation des leur foi, à ceux-là il est donné de parvenir un jour, dans l’émerveillement et la joie, aux pieds de Celui qui est capable de les sauver. Comme les Mages qui, après tant de péripéties, arrivent finalement à la maison de la Mère et de l'enfant.



MB



Epiphanie - ouverts à la lumière


EPIPHANIE – OUVERTS À LA LUMIÈRE

Nous sommes ici en présence d’un texte d’évangile qui le long des siècles a charmé des générations d’enfants et de chrétiens et qui continue de nous émerveiller pour la richesse de ses symboles et la qualité du message qu’il cherche à transmettre. En effet, si nous savons interpréter comme il faut le contenu caché de ce récit pittoresque et merveilleux, nous découvrirons que son auteur est un catéchète hors pair, un théologien d’un génie  extraordinaire. À travers les faits et les images qu’il nous propose, il trace en réalité, pour tout homme en général, et pour le croyant et le disciple du Seigneur en particulier, les étapes de ce que devrait être son cheminement intérieur pour arriver à trouver l’enfant divin qui repose en chacun de nous et devant lequel nous devrions être capables de déposer, comme un cadeau, le sens de notre vie.  Ce récit des Mages est finalement une parabole sur la fonction et la nécessité de vivre notre vie en nous laissant entraîner, transporter par la foi (représentée ici par l’étoile) et, plus particulièrement, par la foi en la présence de Dieu dans notre monde.

Foi qui est d’abord présentée ici comme lumière, comme illumination, comme infusion d’une sagesse qui nous vient d’en haut, comme don divin qui parcourt le ciel de notre vie et nous donne la capacité de regarder   la réalité avec les yeux de Jésus qui sont finalement  le regard de Dieu.
Foi aussi comme disponibilité à accueillir du nouveau dans notre vie; à abandonner nos assurances, nos certitudes établies; foi comme attitude à se remette continuellement en question; comme capacité à partir plus loin, à marcher sur des chemins qui nous déstabilisent parce qu’ils nous obligent  à laisser  la tranquillité et le calme de notre chez nous chaud et douillet … car sans cela jamais nous connaîtrons d’autres pays, jamais nous verrons d’autres horizons, jamais nous ferons de nouvelles rencontres qui donneront peut-être un souffle nouveau à notre existence et qui seront à l’origine d’un nouveau commencement et d’une nouvelle naissance. La nuit de notre vie sera sans étoiles, si nous ne la vivons pas avec le souci continuel de regarder plus haut et plus loin pour détecter l’apparition de sa  lumière.

C’est tout cela que l’évangéliste veut nous dire en nous présentant ces mystérieux personnages qui arrivent à Jérusalem  de l’Orient. L’Orient, c’est loin; l’Orient c’est un pays lointain; c’est le berceau du soleil. L’Orient est alors la patrie de tous ceux et celles qui sont épris de lumière et qui sont représentés ici par ces personnages énigmatiques qui voyagent attirés par le mouvement d’une étoile. Ces gens qui viennent de l’orient, d’un pays étranger, sont appelés «mages» pour signifier qu’ils ne  sont pas des personnes ordinaires; ils ne sont pas comme tout le monde; ils ne sont  pas des juifs, ils n’appartiennent pas au peuple élu….et pourtant, et voilà le message extraordinaire que le récit  évangélique veut transmettre, et pourtant ces infidèles, ces païens viennent du pays du soleil; ils sont des apprivoiseurs d’étoiles; des chercheurs de lumière; ils ont  vu  l’Astre de Dieu ….et les voilà en chemin à sa poursuite. Une poursuite qui les amènera loin, dans un endroit étranger, dangereux, hostile, où ils risquent leur sécurité et même leurs vies…

C’est le risque à courir lorsqu’on est à la recherche de lumière, ou de quelque chose ou de quelqu’un qui peut «sauver» notre vie. Rien n’est assuré dans cette quête de vérité. L’élan intérieur, l’enthousiasme, la ferveur, l’étoile qui  nous a toujours guidé vers Jérusalem, vers le pays où nous espérions rencontrer le Messie, peuvent disparaître un jour et nous pouvons nous trouver à nouveau dans l’obscurité et exposés aux menaces et aux dangers d’un Hérode. Cependant, si nous persistons dans la recherche du Messie qui doit naître pour nous et en en nous, de cet enfant innocent et de ce fils de Dieu que nous sommes finalement  tous au plus profond de nous même, alors, certainement, nous assure ce récit, l’étoile réapparaîtra qui nous conduira à faire la rencontre d’un «Sauveur».

Par contre, les juifs de Jérusalem, avec Hérode, les scribes et les pharisiens représentent  ceux qui ne sentent pas le besoins de se mettre en marche. Ceux qui  se sentent très bien là où ils sont. Ceux qui pensent posséder la lumière. Ils ont la compétence, le savoir faire, la science et la connaissance des Écritures. Ils sont capables de les lire et de les  d’interpréter. Eux, ils savent  déjà tout ; ils savent  déjà où se trouve  le messie; ils  n’ont pas besoin de le chercher.  Et c’est pour cela, nous  dit ce texte de l’évangile, qu’ils ne le trouveront jamais. Puisqu’ils ont eu trop confiance en eux même, en leur savoir, en leurs certitudes, en leurs croyances religieuses; puisqu’ils n’ont jamais su regarder plus loin que leur nombril, ils ne verront jamais aucune étoile. Puisqu’ils n’ont jamais été capables de s’émerveiller et de s’interroger en regardant le ciel, ils ne pourront  pas  reconnaître les signes de la naissance et de la présence tout proche de Dieu dans  leur vie et dans le monde. Et pourtant il était là…. à Bethleem… à  quelques pas de Jérusalem… et ils ne l’ont jamais  rencontré!!!  Alors que les mages, les païens se sont ouverts à la nouvelle Lumière, ont accepté  de se faire éclairer par la foi en l’incarnation de Dieu, eux, les membres du peuple élu, les héritiers des promesses divines, sont restés figés dans  le refus et l’obscurité. 

Cette parabole des mages a été écrite pour faire l’apologie de l’universalisme chrétien. C’est la fin de particularisme, de l’élitisme. Désormais il n’y a plus de peuple élu; tous les peuples de la terres sont élus par Dieu pour entrer dans son royaume; tous sont appelés à se prosterner devant lui; tous sont appelé à découvrir l’enfant de Dieu que chaque personne est dans les profondeurs de son être. Toutefois, la découverte  de cet enfant ne peut se faire que si nous sommes capables de nous  délester de nos carcans et de vivre une existence caractérisée par  une certaine forme de manque, d’insatisfaction, de détachement, de simplicité, de pauvreté, de lâcher prise,  afin de récupérer notre liberté et de nous rendre sensibles (attentifs)  aux appels qui viennent de l’intérieur de notre cœur. Ces appels, lancés par l’enfant  qui est en nous, répercutent toujours la voix de Dieu et  sont le signe le plus évident et le plus merveilleux de sa présence.

MB, 2012

Une famille pas très «sainte»


La famille de Jésus – Une famille pas très «sainte»


Le dernier dimanche de décembre la liturgie catholique célèbre la fête de la «Sainte Famille de Nazareth ». Le but de cette fête «catholique» est de présenter aux chrétiens la famille de Jésus comme une famille exemplaire, idyllique où tout beigne dans l’amour, l’harmonie, l’entente, la compréhension, le respect réciproque, la paix; le tout vécu dans une atmosphère religieuse de piété et de sainteté, de dévotion de contemplation, d’expériences mystiques face aux merveilles opérées par la présence de Dieu dans la vie de chacun.

Mais c’est une fausse présentation ! En réalité, l’atmosphère qui règne dans cette famille est loin d’être exemplaire et idyllique. Si cette famille est «extraordinaire» comme dit la tradition chrétienne, c’est plutôt à cause des problèmes et des difficultés extraordinaires (= hors de l’ordinaire) qu’elle a dû affronter.

 Commençons par la mère, Marie. Le drame de cette femme, pour qui son premier-né Jésus a été le fruit d’un grand amour qu’elle a reçu comme l’accomplissement de ses désirs les plus secrets et comme le plus beau cadeau du Ciel, le drame consiste dans le fait que cet enfant, tant attendu et tant désiré et en lequel elle  avait mis tant d’espoirs, de fait, il ne lui a jamais vraiment appartenu. Il a été, dès les débuts, un enfant qui a semblé se dérober à son affection et à sa protection; qui ne s’est jamais laissé traiter comme une propriété de sa mère; qui ne s’est jamais laissé encadrer dans les structures traditionnelles de sa famille, de la société, de la culture et de la religion de son époque; qui toujours voulu utiliser d’une liberté, d’une indépendance que cette mère, possessive comme toutes les mères, a eu beaucoup de difficulté à accepter et à intégrer à sa vie.

Il y a eu ensuite le contexte familial concret dans lequel Jésus a vécu : une famille paysanne, avec des nombreux enfants et des parents incultes mais très religieux. Et au sein de cette famille, le fils aîné qui pense avoir reçu de Dieu une mission importante à accomplir. On peut imaginer les affrontements, les tiraillements, les conflits, les frictions, les incompréhensions ( qui apparaissent  tout au long de la vie de Jésus)  où  le père, la mère, plusieurs  frères et sœurs  doivent  gérer ensemble  une  vie commune  avec ce frère aîné,  spécial,  difficile, original,  qui ne réussit à  trouver sa place nulle part.

C’est une famille qui a dû, en plus, passer à travers l’affreuse, l’éprouvante et la déchirante expérience d’avoir  élevé en son sein une «tête chaude», un frondeur, un perturbateur, un contestataire, un visionnaire, un genre de messie  révolutionnaire qui sera éliminé comme un  vulgaire criminel, pendu au poteau d’une croix.

La fin  ignominieuse  de ce fils ne fut  pas l’événement d’un instant. Elle s‘est préparée tout  au long de sa vie en famille : de l’enfance, en passant par l’adolescence, à travers la jeunesse, jusqu’à l’âge adulte. Ses parents, ses frères et sœurs ont été les témoins de sa transformation et de sa maturation intérieure qui n’allaient pas du tout dans le sens de la normalité, des idées reçues, des traditions acceptées, de la soumission docile aux autorités constituées. Cet enfant, cet adolescent, ce jeune-homme avait des convictions toutes personnelles qui contrastaient avec celles des autres. Il critiquait le formalisme de la pratique religieuse. Il dénonçait l’inutilité de la religion pour le bonheur et le salut de l’homme. Il dévoilait la vanité et l’hypocrisie de la caste sacerdotale. Il affirmait la nécessité d’un rapport direct avec Dieu,  bâti dans la confiance,  la vérité, l’authenticité  et l’amour. Jésus a dû sans doute scandaliser à maintes reprises ses parents avec ses  idées pas très orthodoxes sur la fonction de la Loi, sur la nature de Dieu, sur la nécessité de nettoyer la  religion de tout ce qui asservit  la personne et au lieu de la libérer. Dans cette famille Marie et Joseph ont dû, sans doute, se mettre souvent les mains dans les cheveux, en écoutant les propos de ce fils pas comme les autres, qui ne finissait pas de les surprendre et de les chavirer. Je n’aurais pas été surpris  d'entendre Marie s’exclamer, en écoutant les discussions de Jésus avec son père et ses frères et sœurs : «Mais quel genre d’enfant ai-je mis au monde ! »

Dans cette famille Jésus n’a jamais été un enfant ni commode, ni complaisant, ni docile, ni très poli. Vous pouvez facilement imaginer le stress que les parents ont dû vivre avec un fils de ce genre, qui malgré tous leurs efforts, ne change pas, ne s’améliore pas, au contraire, il empire, il persiste à faire à sa tête, à avoir des drôles d’idées et qui en plus affirme que ses idées lui viennent directement de Dieu. Un fils comme cela a tout pour rendre impossible la vie de ses parents. L’évangile nous dit que devant le comportement  de cet enfant, sa mère intriguée passait des heures à s’interroger, à réfléchir et, j’ajouterai, … à pleurer.

Jusqu’au jour où cet enfant impossible prend le large, quitte la maison paternelle où il se sent incompris et suffoqué. Il part pour suivre son destin. Pour vivre sa liberté et en liberté. Pour crier aux quatre vents les convictions qui l’habitent et la foi qui le fait vivre. 

Jésus  gardera toujours, tout au long de sa vie publique, des relations conflictuelles avec sa famille. Sa famille, ses frères et sœurs ne lui seront (au moins aux débuts de son activité) d’aucun soutien dans  l’accomplissement de la mission qu’il affirmera avoir reçue de Dieu. Au début, ils le prennent même pour un exalté, pour quelqu’un qui a perdu la tête et, craignant pour sa sécurité,  ils veulent  lui faire comprendre le bon sens et le ramener de force à la maison pour que cesse cette dangereuse comédie. Mais Jésus est de la race de ceux qu’on ne manipule pas facilement. Ils doivent donc se résigner à le laisser à  son destin,  car ils se rendent  compte que tous les efforts déployés pour le ramener  sur «le droit chemin» ne servent finalement qu’à l’éloigner d’eux toujours davantage et à le confirmer encore plus dans ses positions.

Jésus ne parlera jamais de son père; il gardera toujours à distance sa mère. Il ne mêlera jamais sa famille à ses activités de thaumaturge et de prédicateur. Il  ne  permettra pas que les agissements (bien intentionnées) de ses frères et sœurs entravent d’une façon  quelconque la route  qu’il pense devoir suivre.

Lorsqu’on a tout cela à l’esprit, comment dire de Jésus qu’il a vécu dans une famille idéale, exemplaire, dans une «sainte famille» ? La «Sainte Famille» n’est qu’un mythe de la dévotion chrétienne qui, au cours des siècles, a cherché à enjoliver avec les couleurs de la sainteté et de la perfection  tout ce qui a trait  à la vie de Jésus, afin que tout devienne paradigme et modèle pour chaque chrétien.
Mais ce qui est admirable dans cette famille si éprouvée c’est le fait que Jésus ait été capable de la faire évoluer et de la conduire à entrer dans l’acceptation de sa vision des choses, de sa foi et de sa mission et finalement à l’incorporer pleinement  à la réalisation de sa  nouvelle  communauté de croyants. Après la mort de Jésus, sa mère deviendra une figure clef dans le groupe des disciples du Maître de Nazareth. Pendant des années, Jacques, l’un de ses frères, deviendra  l’organisateur et le responsable principal  de la communauté chrétienne qui avait pris naissance à Jérusalem.


 MB


PS Les frères de Jésus sont mentionnés dans plusieurs versets du N.T.  Matthieu 12:46, Luc 8:19 et Marc 3:31 disent que la mère et les frères de Jésus vinrent le voir. Les évangiles nous disent  que Jésus avait quatre frères: Jacques, Joseph, Simon et Judas (Matthieu 13:55). Ils  nous disent aussi que Jésus avait des sœurs, mais elles ne sont pas nommées ou numérotées (Matthieu 13:56). Dans Jean 7:1-10, ses frères vont à la fête, tandis que Jésus reste derrière. Dans Actes 1:14, ses frères et sa mère sont décrits comme en prière avec les disciples. Galates 1:19 mentionne que Jacques était le frère de Jésus. La conclusion la plus naturelle de ces passages est d'interpréter que Jésus avait effectivement des frères et sœurs de sang.

Mais ce qui pousse les catholiques à nier et à altérer, d’une façon malhonnête et partisane, le sens obvie de ces textes d’évangiles c’est  leur attachement au dogme-mythe de la «virginité  perpétuelle» de Marie, la  mère de Jésus, dogme que les catholiques comprennent et interprètent  d’une façon matérielle, physique, génitale et  physiologique .

Le rêve d'un Noël éternel


L’ENFANT DE DIEU QUI DOIT NAÎTRE ….


À Noël nous avons tendance à devenir tous un peu sentimentaux, nostalgiques, rêveurs, poètes. Nous cherchons à vivre pendant quelques jours dans un monde différent; nous essayons de créer autour de nous un  monde enchanté, magique, féérique, chargé de lumière, de couleurs, de décors; nous camouflons, l’instant d’un rêve, la grisaille de notre monotonie quotidienne avec des fleurs, des boules, des sapins, des  cloches, de la musique, des chants, des cadeaux; nous créons un monde plus beau où  il y a de la joie, de la fête; un monde où les gestes de la gratuité, de l’amitié, de l’amour, du don, de la tendresse semblent  devenus des attitudes normales pour tous et faire partie du paysage. On dirait que l’on veut expérimenter un monde différent de celui dans lequel nous vivons habituellement ; on veut réaliser pour un moment un rêve, une utopie, un désir; donner consistance à un soupir intérieur, à une aspiration toujours inassouvie et  pourtant  toujours présente dans notre cœur: la création d’un paradis perdu, un monde où tous sont heureux et duquel a disparu la haine, la rivalité, la méchanceté, la pauvreté, la solitude et la souffrance. Un monde restauré dans une bonté intégrale, dans lequel les hommes ont retrouvé leur innocence, leur pureté, leur bonté; dans lequel ils  peuvent, pour un moment, entrevoir leur vrai visage et sentir comme est magnifique leur humanité lorsqu’elle se laisse conduire par un cœur d’enfant.

 On dirait qu’en ce temps de Noël tout le monde vibre à l’unisson avec les sentiments exprimés par le poète hébreux  appelé d’Isaïe lorsque il y 2600 ans il écrivait: «le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière, sur ceux qui habitaient le pays de l’ombre, une lumière a resplendi... et tout le monde est dans l’allégresse comme on se réjouit en faisant la moisson, comme on exulte en partageant les richesses des vaincus … car un enfant est né en nous ….».

Ce qui signifie que nous portons en nous depuis la nuit des temps cette aspiration vers un monde nouveau; que nous sommes depuis toujours habités par le désir de nous améliorer, de nous transformer en des êtres de bonté, de lumière, en dissipant en nous les zones d’ombre, en nous libérant du mal qui nous défigure, en récupérant le meilleur qui est en nous et qui est toujours là, caché au cœur de notre être et qui ne demande qu’à naître, qu’à se manifester, qu’à se développer pour instaurer un éternel Noël dans notre monde.

 Les textes bibliques que nous lisons en cette période de Noël nous annoncent que ce monde nouveau, auquel nous aspirons et pour la construction duquel nous existons et pour l’avènement duquel nous avons reçu de Dieu notre humanité, est strictement dépendant de la naissance de l’Enfant. Les textes sacrés présentent cet Enfant duquel dépend le salut de notre monde comme un fils de l’homme qui est en même temps un Fils de Dieu, venu s’insérer au cœur de notre humanité. 

Ce fils de Dieu que notre foi chrétienne voit avant tout incarné dans l’enfant de Marie de Nazareth, est le symbole, l’image, le prototype, la manifestation  de ce chaque humain, de ce que chacun de nous est, en vérité, aux yeux de Dieu, lorsque, nous débarrassant du mal qui nous pervertit, nous réussissons à retrouver quelque chose de notre perfection originale, de notre vraie nature, c’est-à-dire lorsque nous réussissons à retrouver l’enfant de Dieu  que nous sommes  au plus profond de nous-mêmes.

Le mystère de la fête de Noël constitue en réalité pour nous, les chrétiens, une révélation  existentielle inouïe. La magie qu’il crée, l’émerveillement et l’enchantement qu’il suscite, l’amour, la générosité, la joie et la paix qu’il fait naître dans le cœur des hommes, tout cela sont des indices, des signes, des avant-goûts qui font pressentir que quelque chose de meilleur est possible pour notre humanité; ce sont  des pistes qui nous indiquent que dans ce monde sont à l’œuvre des forces bénéfiques extraordinaires dont le but est de transformer notre réalité humaine malade, désaxée, défaillante, égarée  en quelque chose de plus sain, équilibré, fiable, aimable et de plus plaisant pour tous.

            Et tous les récits qui se sont formés autour de l’Enfant de Bethléem et que nous trouvons regroupés dans les évangiles décrivent le monde nouveau, rénové, extraordinaire, miraculeux qui pourrait exister sur notre terre, si tous les humains laissaient naître et transparaître l’enfant de Dieu qu’ils sont fondamentalement en eux-mêmes et qui constitue la vérité la plus profonde de leur humanité. C’est un monde merveilleux qui surgirait alors et qui ressemble étonnamment au monde magique de nos Noëls. C’est un monde où les anges apparaissent, parlent, chantent, où les étoiles indiquent la route aux humains, ou les bébés descendent du ciel pour entrer dans le ventre de leurs mamans; où Dieu se transforme en colombe pour communiquer avec les hommes; où les aveugles sont capables de voir, les paralysés de marcher, les muets de parler et les sourds d’entendre; où les enfants malades sont rendus pétillants de santé à leurs mères; où les morts sortent vivants de leur tombeaux; où l’homme peut commander aux vents et aux tempêtes pour les apaiser ; où il peut marcher sur les eaux profondes de la mer sans couler et où le pain peut être distribué en abondance à ceux qui ont faim, sans jamais s’épuiser.

Ces récits sensationnels que les évangiles nous proposent n’ont pas tellement pour but de nous émerveiller, mais plutôt de nous annoncer la possibilité d’une monde meilleur, la naissance d’un nouvel ordre de choses, d’une nouvelle forme de vie, d’une nouvelle société, d’un total renouvellement, d’une complète guérison, d’un  salut et d’un bonheur véritables donnés à notre humanité, grâce à la présence de cet enfant de Dieu déposée au cœur de chacun de nous. Si, comme Jésus a fait au cours de sa vie, nous laissons que l’enfant ou le fils de Dieu que nous sommes sorte au grand jours, vienne à la lumière, motive, inspire nos choix, inspire nos actions et oriente nos aspirations, il sera toujours Noël sur notre terre; il y aura toujours de l’amour dans l’air et des anges pour nous accompagner, du pain pour tous en abondance sur la table, et tout  le monde marchera droit, la tête haute, conscient de sa dignité, fier d’appartenir à la race de fils de Dieu, éclairé par son Esprit, heureux de vivre dans un monde sauvé, ennemi du mal et bâti sur l’amour, l’admiration, le respect, la simplicité, la justice et la paix.
Serons-nous des bâtisseurs de Noël sur terre?  Serons-nous à la hauteur du don que nous avons reçu? C’est la grâce que nous devrons nous souhaiter les uns les autres en ce temps de Noël.   Joyeux Noël !!!

MB