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dimanche 25 août 2013

ENTRER PAR LA PORTE ÉTROITE DE L’AMOUR

ENTRER PAR LA PORTE ÉTROITE DE L’AMOUR
(Luc 13, 22-30)  

Les textes de l'Évangile ne sont jamais banals. Celui de ce jour nous surprend par sa charge contestataire et il nous oblige à revoir nos  positions. Un tel demande à Jésus combien sont ceux qui se sauvent. Quelle est l’affluence aux  portes du paradis ? Y a-t-il bousculade, cohue, engorgement, files d’attentes comme aux portes du Forum de Montréal lors d’un match des Canadiens ou au Centre Bell pour un spectacle de Céline Dion, Lady Gaga, ou de Justin Bieber… ou bien c’est comme aux portes de nos églises le dimanche matin où à peine quelques «originaux» se pointent pour entrer ?

Peut-être que cet homme de l’évangile avait déjà posé cette question aux rabbins ou docteurs de la loi de son temps, sans être en mesure d'obtenir une réponse qui puisse satisfaire sa curiosité ou calmer sa peur de l'au-delà. C'est la question que les hommes se sont posée depuis la nuit des temps; depuis qu’ils ont acquis la capacité de penser. C’est la question à laquelle nous nous confrontons souvent avec angoisse et anxiété. Qu’adviendra-t-il de moi après ma mort? Y a-t-il vraiment une survie, un bonheur qui m’est réservé, un «paradis», une Puissance, une Énergie, un Dieu qui me connaisse, qui m’attende, qui m’aime, qui m’accueille, en qui je découvrirais le fondement de mon être et où je trouverais enfin la source et le milieu de mon épanouissement et mon repos? Est-elle réelle ou envisageable la menace d’une exclusion, d’une réprobation, d’une faillite existentielle définitive que l’on appelle communément  un «enfer»?

Ou tout cela n'est rien qu’un mythe, un rêve, un délire, le produit de mon désir, une projection ou une construction de mon esprit qui ne veut pas se résigner à la mort, qui refuse de disparaitre à tout jamais dans le vide et le néant ? Ou toute cette histoire de paradis et de vie après la mort est simplement un conte de fées inventé par les religions et  les prêtres pour embobiner les gens simples  et ignorants, afin de les attirer dans leurs sanctuaires, les dominer, les exploiter soit avec la promesses d’un bonheur éternel  qu’eux seuls peuvent assurer, soit avec la menace d’une damnation éternelle qu’eux seuls peuvent empêcher ?

Autre question inquiétante: si le paradis existe vraiment, est-il pour tout le monde ou seulement pour certains privilégiés ? Serais-je du nombre des élus ou des répudiés? Serais-je capable de réaliser dans ma vie les conditions indispensables à ce salut ; serais-je à la hauteur des exigences nécessaires pour atteindre la qualité de vie qui me permettra d’hériter du bonheur éternel? Existe-il une élite à laquelle il faut appartenir pour avoir une meilleure chance d’obtenir  la vie éternelle ?   

Jésus refuse de répondre directement à la question que l’homme lui pose sur la «quantité» des sauvés. Jésus lui-même n’en a probablement aucune idée, mais surtout il ne veut pas encourager une curiosité inutile et farfelue. Au lieu de cela, il met toute son énergie à dissiper des malentendus, détruire les préjugés, défaire des fausses convictions; démanteler des dogmes et des certitudes longuement entretenues et établies par le système religieux de son temps qu’il ne partage pas et dont il veut libérer ses disciples.

Jésus veut qu’il soit clair que pour se sauver il n’est pas nécessaire, ou tout au moins, il n’est pas suffisant, d’appartenir à un peuple particulier, à en race, à une culture déterminée, à une institution, à une religion, même si cette religion, ce peuple, cette culture sont celles de Jésus lui-même. Tu n’iras pas au paradis, nous dit Jésus, parce que tu es juif, chrétien, musulman (d’autant plus que chacune de ces religions condamnent les fidèles des autres à la damnation éternelle); mais tu iras au paradis si Dieu, en toi qui es juif, chrétien, musulman voit l’image et la substance d’un fils de Dieu. Jésus de Nazareth aurait pu être en accord avec le Dalaï-lama actuel  qui,  interrogé sur quelle religion il pensait être la meilleure, répondit : «La meilleure religion est celle qui rend l’homme meilleur».

Nous pouvons tous penser d’avoir le droit de frapper à la porte de Dieu et être convaincus que Dieu  nous connait, qu’il est des nôtres, qu’il est de notre famille, car nous l’avons fréquenté à la mosquée, à la synagogue, à l’église, où nous lui avons offert le culte de notre adoration, de notre soumission, de notre prière, selon les rites de nos religions respectives. Nous attendons donc que Dieu nous ouvre immédiatement, et qu’il nous fasse entrer dans sa belle maison. Nous pensons être ses amis et d’avoir bien mérité son accueil et sa bienveillance! Nous pensons qu’il ne serait pas gentil de sa part de nous faire attendre et de nous faire languir à la porte… et pourtant c’est bien ce qui se passe! Alors, pris de panique, du dehors, nous commençons à frapper avec insistance: «Mais Seigneur, qu’est ce qui arrive?  Ouvre-nous donc!» .Mais la porte reste inexorablement fermée.  Et de l’intérieur cette réponse redoutable de Dieu qui  tombe comme un couperet pour trancher et détruire définitivement toutes nos fausses croyances : «Je ne vous connais pas …Vous n’êtes pas de miens … Je ne sais pas d’où vous êtes».

On cherche alors désespérément à se défendre, à se justifier: «Mais Seigneur, tu étais pourtant des nôtres! Nous avons mangé et bu en ta présence, le Coran, la Bible, la Torah ouverts sur la table, la mitraillette sur nos genoux, prêts à partir en guerre pour défendre ta cause. Nous avons plein de martyrs qui se sont faits sauter en l’air en ton honneur et dans l’espoir de jouir des biens de ta maison. Nous nous sommes battus et nous sommes morts, les armes à la main, pour te témoigner  notre attachement et notre fidélité. Nous avons fait des croisades pour conquérir tes lieux saints. Nous avons bâti des cathédrales en ton honneur et la basilique de St-Pierre de Rome pour la gloire du Pape qui est ton représentant sur terre. Tu habitais nos églises et nos tabernacles. Tu as fait des miracles en notre faveur, à Lourdes, à Fatima…On nous a prêché et prêché pendant des siècles qu’il fallait  appartenir à l’église, à ton église pour gagner le salut».
Mais il nous répondra encore: «Je ne sais pas d’où vous êtes. Éloignez-vous de moi, vous tous qui faites le mal». 

Finalement, à ceux qui frappent à sa porte, Dieu pourrait adresser ces paroles: « Moi qui suis l’Amour Originel, l’Énergie d’Amour qui soutient et qui garde tout l’univers dans son existence; moi, qui suis la source de l’Amour qui cherche à tout envahir à tout transformer, je ne vois pas mes traits sur votre visage; je ne vous vois pas remplis de mon Esprit. Vous n’avez aucune ressemblance avec moi. Vous n’êtes pas de ma famille. Vous n’êtes pas mes enfants. Car ce n’est pas Moi, ce n’est pas l’Amour, qui a enflammé, orienté votre vie et motivé vos actions. Vous avez vécu dans la rivalité, la confrontation, la lutte pour le pouvoir, la recherche de vos objectifs personnels, dans une religion sans âme, sans bonté, sans respect, sans tolérance; dans une religion qui vous a appris à haïr plutôt qu’à aimer; dans une religion faite seulement de peurs, de contraintes, d’obligations, de tabous, de rites qui vous ont fait oublier le devoir d’aimer… Vous n’êtes pas les créatures que depuis le début du temps j’ai cherché à produire, à faire évoluer et à préparer pour qu’elles m’aident à rendre ce cosmos plus harmonieux, plus réussi, plus amical et plus beau. Qu’est-ce que vous avez fait de l’amour? Vous n‘êtes pas passés par la porte étroite, exigeante de l’amour… la seule qui vous aurait permis d’être heureux et de bâtir un  paradis sur terre...»

Mes chers amis, ce texte d’évangile nous donne la chair de poule. Il fait tout éclater. Il nous enseigne qu’aucune institution religieuse n’a le monopole, l’exclusivité du salut. Il nous dit que ce n’est pas l’appartenance à une religion ce qui est important pour le salut, mais l’appartenance à l’amour. Le salut est pour tous ceux et celles qui aiment à quelque race, culture, religion qu’ils appartiennent: «On viendra de l’Orient et de l’Occident, du Nord et du Midi prendre place au festin dans le royaume de Dieu….et ceux qui se  croyaient  élus et choisis  seront jetés dehors...»       

BM

vendredi 23 août 2013

Attente



DES ATTENTES QUI NOUS DÉFONT ET DES ATTENTES QUI NOUS REFONT
(Luc 12,32-48)

            Le christianisme des débuts a été fondamentalement une communauté de disciples qui se distinguait par l’attente de la venue du Seigneur. Les premiers chrétiens attendaient non seulement que le Seigneur fasse irruption dans leur vie afin que celle-ci soit transformée grâce à l’action de son Esprit, mais ils attendaient aussi une fin imminente du monde, déclenchée par une deuxième venue du Seigneur ressuscité qui, investi de la puissance divine, aurait inauguré une nouvelle ère de l’histoire du monde où finalement l’amour régnerait en maitre dans le cœur des hommes et Dieu serait tout en tous. Ils ont évidement été déçus dans cette attente. Le monde a continué comme il était; il ne tire pas encore à sa fin et Jésus n’est pas revenu en triomphateur, comme on espérait.

            Il reste cependant que le chrétien est une personne qui fait de l’attente une disposition intérieure permanente. Cela lui vient de sa spiritualité et, disons, de sa «religion». Psychologiquement et existentiellement on doit cependant  dire que l’attente est la posture intérieure qui  nous garde vivants. C’est un fait que nous cessons de vivre lorsque nous cessons d’attendre. La vie n’est plus une vie et ne mérite plus d’être vécue si on n’attend plus rien d’elle. Si cette flamme de l’attente s’éteint en nous; si la lampe de l’espoir n’est plus allumée, nous sombrons inévitablement dans la noirceur de la dépression, de l‘angoisse et du désespoir. Le Nazaréen  avait donc raison de dire : «Gardez cette lumière toujours allumée! »

            Je pense que c’est pour cela que Jésus, qui s‘est donné comme mission d’aider les gens à vivre pleinement, cherche continuellement à inculquer la disposition de l’attente. Son disciple n’est jamais quelqu’un qui s’établit satisfait sur ses acquis, mais quelqu’un qui regarde toujours en avant et qui attend que quelque chose de nouveau se passe dans sa vie pour améliorer son existence. Le disciple du Prophète de Nazareth est donc essentiellement une personne qui est ouverte à l’avenir, qui refuse de se figer, de penser que tout a déjà été fait ou dit et que, fondamentalement, plus rien de nouveau se passera dans sa vie et sous le ciel, comme l’affirmait, d’une façon désenchantée et pessimiste, l’auteur du livre de l’Ecclésiaste.

            Évidemment la qualité de notre attente et, par conséquent, la qualité de notre vie, dépendent de la qualité et de la valeur de ce que nous attendons. Car, ici encore, il y des attentes qui nous fatiguent et nous démolissent; d’autres qui nous permettent, tant bien que mal, de passer à travers la banalité de notre vie et de survivre à la monotonie du quotidien; et, finalement, il y a  des attentes qui donnent des ailes à notre existence, qui  lui donnent du souffle,qui  l’élèvent, qui la font grandir et  la comblent de joie et de bonheur. Ainsi, il y-t-il  a les attentes longues, douloureuses, épuisantes à l’urgence de l’hôpital, à la clinique, chez le dentiste, au guichet des fonctionnaires de l’État, à l’autobus, aux caisse du supermarché; l’attente anxieuse de la fin d’une journée de travail... Il y des attentes un peu plus agréables qui parsèment notre vécu quotidien: la perspective d’un avancement ou d’une promotion, d’une fête, d’un bon repas au restaurant, d’un spectacle ou d’un concert, la visite d’une personne qui nous est chère, d’un voyage, des vacances, etc., toutes choses qui mettent du piquant et du zest dans notre vie. Et il y a enfin l’attente (d’événements, de rencontres) dans laquelle nous mettons un tel désir, un tel empressement, une telle ardeur, une telle trépidation, une telle force, une telle exaltation… que nous en sortons bouleversés et transformés de fond en comble. Les mamans et les papas qui ont attendu leur premier enfant comprennent très bien de quel genre d’attente je parle. Ceux et celles de vous qui un jour sont tombés en amour, peuvent se rappeler la sensation d’anticipation exaltante, presque suffocante et la trépidation qu’ils ressentent lorsque s’approche la rencontre avec la personne chérie de laquelle ils ont été longtemps séparés. Il y des attentes tellement brûlantes qu’elles purifient les scories que nous avons pu accumuler, afin que l’or de notre cœur puisse être offert en toute sa brillance. C‘est de ces attentes là dont Jésus nous parle dans son évangile.

            La parole de Jésus nous aide à discerner la nature et la qualité de nos attentes. Il nous dit: « Soyez comme des gens qui attendent leur maitre à son retour des noces pour lui ouvrir dès qu’il arrivera et frappera à la porte». Remarquez que dans l’évangile le maitre ne retourne pas d’un voyage, ou d’un travail, ou d’une besogne, ou d’une mission. Non! Il retourne des noces. Il est donc quelqu’un qui a expérimenté l’amour; qui connait l’amour; qui sait aimer; qui est rempli d‘amour. Il est essentiellement quelqu’un qui aime. Il signifie et symbolise donc l’amour qui doit entrer dans notre vie; l’amour que nous devons attendre dans notre vie. Le maitre qui retourne des noces c’est l’attitude amoureuse qui doit caractériser et dominer notre quotidien… en maitre. Jésus nous dit qu’avec l’amour on doit conclure des noces. Et lui ouvrir immédiatement la porte de notre cœur lorsqu’il cherche à y entrer. Car nous sommes faits pour l’amour; nous sommes faits pour aimer et nous ne sommes plus des humains lorsque l’amour n’est plus le maitre de notre vie. Nous avons, en effet, le terrible pouvoir de lui  fermer la porte et de ne vivre dans notre propre maison qu'entourés d’insensibilité et d'indifférence, exclusivement fermés sur le petit monde bien confortable et sécuritairequi nous entoure . C’est seulement la découverte de l’Amour qui est capable de nous déposséder de nous-mêmes et de nous lancer dans les bras de l’autre, en nous mettant à son service. Amour et service sont les deux mots et les deux attitudes clefs de tout l’enseignement de Jésus  qui doivent éclairer et embraser notre vie: « Restez en tenue de service et gardez ces lampes allumées …».

             Être chrétien signifie être en attente de l’irruption de l’amour dans notre vie;  avoir relativisé l’importance des autres valeurs matérielles (comme le pouvoir, le prestige,  l’argent…) à un  point tel que nous sommes devenus sensibles uniquement aux valeurs et aux forces qui nous bâtissent intérieurement et qui élèvent notre âme. Dans une vie de disciples, la grâce la plus magnifique qui puisse nous arriver consiste à réaliser et à comprendre la puissance innovatrice et transformatrice de cette révélation qui nous vient du message du Nazaréen: il y a une Puissance d’Amour qui soutient l’Univers et nous attendons qu’un jour elle puisse trouver un chemin  jusqu’à la porte de notre cœur.

MB

dimanche 4 août 2013

Le Dieu argent

L’ARGENT QUI NOUS PERDRA

(Luc 12,13-21  - 18e dim. ord. C )

            C’est un fait que, dans notre société capitaliste, l’argent est tout. Il est l’unique mètre sur lequel on mesure le calibre et l’importance d’une personne. Si tu as de l’argent tu es quelqu’un, si tu n’as pas d’argent, tu n’es personne. Il est le but ultime de toute activité, la valeur absolue pour laquelle on est prêt à sacrifier toutes les autres valeurs qui deviennent secondaires et sans véritable importance: la justice, l’équité, le bien commun, la considération des autres, le respect envers la nature, les écosystèmes, les ressources naturelles de la planète. Il n’y a plus rien aujourd’hui qui échappe à la logique farouche des lois du marché, gérées par un système capitaliste conçu pour assouvir l’avidité et la cupidité humaine, pour enrichir quelques surpuissants et laisser dans la misère le reste du genre humain. Dans ce système capitaliste, tout devient monnayable, négociable, exploitable.  Ainsi, les êtres de notre monde perdent leur identité, leur nature, leurs caractéristiques, leur beauté, leur poésie, leur âme.  Ils ne sont que marchandise ou objet, article, denrée dont l’unique valeur est monétaire ou, au mieux objet d’investigation  dans le but de produire encore plus d’argent.  Le bœuf, le veau, la génisse, le cochon, le mouton, le poulet ne sont que viande à consommer: ils sont côtelette, filets mignon, faux-filet, ti-bone, beefsteak, surlonge, bavette, jambon, cuisse, poitrine…les forêts, que du bois à construction; la mer et les fonds marins, que du poisson à extraire, que des gisements de gaz et de pétrole à exploiter…  Ici, fini le sentiment, la sensibilité, la compréhension symbolique ou une certaine vision idyllique et poétique de la réalité qui humanisent le regard et donnent la possibilité de regarder les choses autrement et d’y découvrir la présence d’un esprit. Un grain de sable, une fleur, une goutte de rosée au matin, un papillon, une libellule, ne sont pas simplement  des « choses ». Ils sont de merveilleux miracles qui devraient nous remplir de commotion et d’émerveillement.

            Cette mentalité capitaliste uniquement basée sur l’argent et le profit risque de nous déshumaniser et de nous abrutir au point de nous vider de notre âme.  En effet elle nous fait perdre le sens du surnaturel, du magique, du sacré, du merveilleux qui est à l’origine de l’émerveillement, du ravissement, du respect que les hommes primitifs ressentaient et ressentent devant la nature et pour qui tous les êtres (animaux, arbres, plantes, fleuves, sources, rivières, roches, montagnes…) sont porteurs d’un mystère; sont caractérisés par une identité unique; possèdent une âme, sont animés par un esprit qu’il faut reconnaitre, invoquer, apprivoiser, tout étant expression d’une Puissance qui nous dépasse et manifestation d’un Grand Esprit qui finalement anime et donne vie à tout ce qui existe.

            Nous sommes devenus rationnels, cartésiens; nous sommes les fils du progrès scientifique, de la technique; nous vivons à l’ère de la physique quantique, de la biotechnologie, de la nanotechnologie, de l’informatique, des découvertes astronomiques, des vols spatiaux. Nous nous vantons d’avoir définitivement abandonné la vision animiste ou sacrée du monde, vision que nous qualifions de mythique et d’archaïque. Nous nous vantons aussi de n’avoir plus besoin, comme dans le passé, de recourir à l’hypothèse de l’existence de Dieu pour expliquer le monde et ses phénomènes. Contrairement aux anciens, nous ne voyons plus Dieu à l’œuvre dans la nature et, pour nous, son esprit n’est plus nulle part.  Cependant, (et voici le paradoxe !), nous les modernes, les intelligents, les savants, les cultivés, les éclairés, qui refusons de voir Dieu partout, comme faisaient  nos ancêtres… nous nous sommes fabriqué notre propre Dieu, le Dieu argent, que nous voyons partout, devant lequel nous sommes en constante adoration et pour lequel nous sommes prêts à tout sacrifier, tout détruire, tout saccager, tout abîmer  tout polluer dans une folle hystérie d’accumulation d’argent qui, si elle n’est pas arrêtée, conduira l’humanité à sa disparition. Robert Muller, ce grand homme qui été  longtemps adjoint-secrétaire général aux Nations Unies avait raison de dire: « We must fear that capitalism will bring this world to an end ( Idea 1125 , 9 August 1997).

            L’évangile d’aujourd’hui nous invite, nous, les chrétiens à relativiser l’argent, à réfléchir sur les dangers qu’il comporte; à en faire un moyen et non pas une fin.  Il nous invite aussi à récupérer la vision sacrée, symbolique, poétique, spirituelle du monde que l’humanité avait à ses débuts et à traiter la nature (animée et inanimée) avec amour, respect, compassion, en comprenant que nous devons lui être solidaires, amis, car elle nous est nécessaire, car elle fait partie de nous-mêmes et nous faisons partie d’elle dans une connexion tellement profonde et essentielle que nous ne pouvons briser sans courir inévitablement vers notre perte.

            Le texte évangélique d’aujourd’hui nous dit que ce qui est «divin» n’est pas l’argent et le profit indiscriminé, qui sont proprement diaboliques car ils divisent l’humanité entre riches et pauvres et sont source d’inégalité, d’injustice, de violence,  d’exploitation, de corruption, de pollution, de destruction et de souffrances.  Par contre, l’évangile nous dit que ce qui est divin, c’est le cœur de l’homme lorsqu’il est guéri et transformé par l’amour qui éclaire son regard et le rend apte à percevoir la beauté et le miracle de ce monde qui déploie de partout les signes et les traces de la présence de l’Esprit de Dieu.


BM


God made only one mistake when he created the Earth: it was to create man. Of course he had an excuse, it was the last day of his hard labour to create a miraculous, incredibly beautiful paradise Earth and He was tired (cité par Robert Muller).
I cannot understand why love is not inundating our Earth. Why must it be business, money, 'freedom of enterprise', more and more merchandises and 'goods', running around the world and endless activities and agitations? How about love for our beautiful Earth and her nature, love for peace and tranquillity, love for our neighbours and our environment, love for the depth and genial meaning of our individual, miraculous human life? (Robert Muller, Idea 4930)